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LES ŒUVRES : Leurs œuvres

 

LES ŒUVRES

 

 RENE BOYLESVE ou BIBLIOGRAPHIE ou PAGE D'ACCUEIL

 Le Médecin des Dames de Néans    Azurine  Sainte-Marie des Fleurs   La Becquée - Les Bonnets   L'enfant à la balustrade  Mademoiselle Cloque 

La leçon d'amour et les Nouvelles leçons   La Jeune fille bien élevée - Madeleine Jeune femme   Tu n'es plus rien  Le carrosse aux deux lézards verts  

Je vous ai désirée un soir  Le Parfum des îles Borromées   Voyage aux îles Borromées   Le jardin détruit   Le Bel Avenir

Voir également : Feuilles tombées

La Becquée, L'enfant à la balustrade, Mademoiselle Cloque, La jeune fille bien élevée, Madeleine jeune femme, quel auteur ayant à son actif cinq livres tels que ceux-ci pourrait être oublié ? René Boylesve, qui a encore écrit d'autres livres intéressants puisque, par exemple, ma préférence dans son œuvre va au Médecin des dames de Néans. Oublié tant de l'édition que de l'université qui pourtant s'intéresse à un auteur tel que Marcel Schwob tellement moins marquant. Les six œuvres qui viennent d'être citées auraient leur place dans une collection telle que la Pléiade où figurent bien des romans qui ne les valent pas et de loin ! A défaut Calmann Lévy, éditeur historique de Boylesve pourrait peut-être pour sortir cet auteur de l'oubli, éditer un volume regroupant ces œuvres assorties d'une préface situant l'auteur pour le public d'aujourd'hui. Mais cette œuvre est libre de droits et n'importe quel éditeur pourrait la reprendre comme l'ont fait il y a quelques années, pour plusieurs livres, les responsables de la collection 10/18.

 

On ne comprend Boylesve que si on se souvient qu'il est un ironiste, tous ses livres sont des comédies parce que nous dit-il : La comédie, genre parfois plaisant, mais non pas gai et que constitue principalement le choc du réel contre la logique ou l'idéal. Elle prend son meilleur aliment dans ce terrain à mi-côte entre les hautes et les basses terres. " On peut difficilement mieux définir le vécu quotidien : " le choc du réel contre la logique ou l'idéal. " Souvent Boylesve nous met sous les yeux des héros qui sont des caricatures sans que l'on s'en rende vraiment compte parce qu'il leur donne dans le même temps leur part de profonde et simple humanité. C'est ce qui devrait la rendre ridicule qui fait à Mademoiselle Cloque une sorte de grandeur et c'est bien précisément le refus du réel au nom d'un idéal. Même chose chez l'abbé de Prébendes totalement ridiculisé puis restitué avec force dans son intégrité d'homme d'idéal dans les derniers chapitres du Médecin. Que l'on examine Madeleine ou Elise ou les héroïnes de la Becquée et bien d'autres encore, on trouvera le même mélange de ridicules ou d'inadaptations transposées. Souvent, c'est le cas de Mademoiselle Cloque, le ridicule va aux idées qu'elle incarne, épargne aux yeux du lecteur le personnage, et l'auteur parvient à ce petit miracle de faire comprendre ce qu'il dévoile tout en faisant le cœur de sa comédie. Mais nous dit-il également : " La comédie, genre parfois plaisant, mais non pas gai ..." Boylesve accentue parfois l'aspect comédie au travers de personnages secondaires, ils foisonnent dans Mademoiselle Cloque, mais l'on sent très bien ( parce qu'il le fait sentir ) que ces personnages recèlent une part d'authenticité qui leur donne un poids d'humanité au travers duquel ils vont nous toucher. Si l'auteur est si difficile à cerner c'est certainement pour cette raison que rarement autant que chez lui, un romancier ne s'est autant senti " frère " des humbles qu'il peint malgré et avec leurs ridicules. La comédie d'analyse pourrait-on dire, trouve ici une expression unique et est peut-être à comparer avec le tragique qu'un Zola nous montre dans une humanité qui au-delà de toutes les solidarités qu'elle peut entraîner, au-delà du talent immense de l'auteur, demeure "derrière la vitre". Zola est un ethnologue créateur de génie, là où Boylesve est un romancier du vivant. Mais qui le croirait, Boylesve est un écorché, un homme d'une sensibilité extrême et ses colères vont non pas à un réel qui déçoit, mais aux faiseurs d'illusions, de rêves qui sont cause des déceptions pour avoir laissé entrevoir un illusoire idéal.

 LE MEDECIN DES DAMES DE NEANS :

 

Rarement certainement, un premier roman n’a été une telle synthèse de l’œuvre à venir et d’une telle qualité. Ce roman dense se présente comme un roman libertin : un médecin veut guérir les dames de sa ville de l’état de langueur dans lequel les plonge la vie mortellement ennuyeuse d’une petite ville de province. Pour cela, il favorise une intrigue entre une de ses patientes et un jeune homme de bonne famille placé sous la tutelle de l’abbé de Prébendes. L’œuvre n’est cependant pas seulement un roman libertin sur fond de vie provinciale. Au travers du jeune homme, on suit l’éveil à l’amour, une véritable éducation sentimentale. L’œuvre est antireligieuse, cependant, alors que le médecin triomphe de l’abbé de Prébendes, éducateur à l’esprit étroit, au travers de la lettre du père, conseiller général, abbé qui en meurt, vient un éloge de l’honnêteté, de la conviction qui, sans nous faire douter des sentiments vraisemblables de l’auteur, nous donne une idée de la complexité de sa personnalité. Œuvre d’observation psychologique, dont certains passages, comme le souligne Gérard Gailly, un proche de René Boylesve et son exécuteur testamentaire, font penser, dès 1896, à Marcel Proust. L’admiration de ce dernier pour l’ensemble de l’œuvre de Boylesve sera d’ailleurs formulée au travers d’une correspondance assez mince mais sans ambiguïté. Le Médecin est l’œuvre de René Boylesve dont on peut le plus regretter l’oubli qui la frappe, c'est une œuvre majeure de notre littérature non seulement parce qu'elle y marque un tournant réussi mais aussi par sa valeur intrinsèque. Outre Marcel Proust d'autres parentés de Boylesve y sont "à peine" perceptibles étouffées par l'originalité du ton de l'auteur, celle d'Anatole France alors en pleine gloire, celle de Flaubert qui à cette époque avait marqué définitivement la littérature française, celle des libertins. Ces influences - peut-on employer ce mot? - ne s'agit-il pas tout simplement des corrélations inévitables entre gens issus d'une même culture, s'épanouiront dans des œuvres différentes qui laboureront chacune un des sillons ouvert dans le Médecin. René Boylesve a certainement fait preuve dans certaines œuvres d'une plus grande maîtrise jamais il n'a autant mis, avec autant de force et d'ironie, que dans cette première œuvre qui demeure un chef d'œuvre quelles que soient les reproches que l'on puisse lui faire.

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 AZURINE OU LE NOUVEAU VOYAGE

 

Publié en 1895 dans le numéro du mois d'août de la toute nouvelle revue Le Monde Moderne, le Nouveau Voyage est le premier texte littéraire concernant l'automobile *. Dans ce court récit, sur un ton ironique, l'auteur nous décrit un voyage à dix-sept à l'heure qu'il effectua en juillet 1894, de Paris au Lac du Bourget dans une Panhard et Levassor appartenant au beau-frère de sa sœur, l'ingénieur Louis Mors. Ce texte devait être republié en volume en 1926 par Gérard-Gailly, dans la collection des Amis d'Edouard (N°108). René Boylesve s'intéressait à l'automobile comme aux chemins de fer en tant qu'élément qu'il pressentait devant devenir déterminant dans l'évolution de la société. Le Carrosse aux deux lézards verts sera plus tard une illustration des conséquences de ces inventions qu'il craignait.

* C'est à ce titre qu'il semble être recherché aujourd'hui par certains amateurs dont un que je remercie pour ses communications. 

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 SAINTE-MARIE DES FLEURS

 

Roman de jeunesse inspiré d'une aventure vécue ce livre pose un vrai problème dans l'appréhension de l'homme Boylesve. Difficile d'imaginer l'étudiant à la vie légère, l'auteur de certaines nouvelles oubliées où fleurissent les demoiselles faciles cohabitant avec l'amoureux transi de Sainte-Marie, il le faut, c'est le même homme et si l'aventure fut bien celle qu'il rapporte on perçoit ici quelque chose de la double nature de l'auteur, de ses déchirements entre des aspirations élevées et un sensualisme fort qui le mena au libertinage vécu et littéraire. L'amoureux amplifie son influence sur une jeune fille qui se découvre dans son amitié : " Assurément, j'avais voulu agir sur ce cerveau de jeune fille, mais l'ayant touché, dans une mesure déterminée, j'étais effrayé de voir la puissance soudaine de tout le restant de mes petites forces. " p55*. L'amour est parent de la douleur et l'homme s'y complait : " La catastrophe abasourdit ; sous le coup l'on est que stupide. Après seulement l'homme avec son merveilleux outillage de douleur se réveille. " p79. C'est que le rêve ici l'emporte, on voudrait demeurer dans l'éther dont on goûte avec ravissement la volupté même si on aspire au bonheur commun. " ... est-ce que le fond de tout cela n'est pas qu'il ne faudrait point tremper la main dans la source qui alimente notre rêve ? Mieux vaudrait ne vivre que de chimères, qui sont la seule vérité. " pp57-58. Propose l'amoureuse qui ressent la qualité de ses émois. L'amoureux répond : " C'était une si grande émotion quand elle arrivait que nous ne savions que dire ni l'un ni l'autre . Nous passions quelques secondes à nous regarder; nous avions l'air tout ébahis, et nos yeux se demandaient: « Est-ce possible? » Il y avait un mouvement naturel et que tout nous portait à accomplir , c'était d'ouvrir nos bras et de nous y précipiter. Mais, nous ne le faisions pas. Tous les élans de la tendresse physique inconsciente étaient arrêtés par l'extraordinaire volupté de nous voir côte à côte et de sentir que nous ne pouvions pas parler, et de nous surprendre des larmes montantes à cause de notre amour. Oh! je fais appel à tous les amants : j'ai goûté  toutes sortes d'ivresses ; mais je n'ai rien éprouvé qui approchât de la seule présence de cette jeune fille dans ma chambre, muette, abritée de mes caresses, et me donnant seulement son beau regard humide où il était visible qu'elle se vouait à mon adoration. " p 94. L'auteur nous le dit : " ... j'ai goûté toutes sortes d'ivresses ..." qu'il soit clair qu'il est bien l'homme des Bains de Bade et le futur auteur des Leçon d'amour. Si la sensualité pouvait se réaliser ailleurs que sur cette terre ! Au paradis des sens et des émotions réconciliées ! Sainte-Marie des fleurs est un livre de la veine élégiaque, comme Mon Amour. Ce n'est ni plus ni moins René Boylesve que le reste de l'œuvre. Ce roman témoigne de ce rapprochement entre l'amour et le spirituel qui nourrit une nostalgie de Boylesve, l'amour platonique étant évidemment l'approche la mieux réussie. Les termes témoignent : p96 : tabernacle, divin, mystère, p 99 : petite chapelle, madone, dieu, bénit, adoré, p132 : divin, auréolé, adorateur, prière ... On ne peut pas parler de Sainte-Marie des Fleurs sans évoquer "l'italianisme" de Boylesve que l'on trouve également dans la Parfum des îles Borromées qui semble lui être consacré dans la seconde version tellement inférieure à l'autre. Il faut peut-être avoir à vingt ans parcouru Florence comme le héros de Sainte-Marie, ses églises, ses musées, ses palais et ses jardins dans l'obsession d'une femme aimée, absente, et connu la fièvre amoureuse enveloppé par l'air tiède et caressant de la ville pour comprendre ce sentiment unique nourri de sensations exceptionnelles qui vous étreint dans une caresse qui pourrait contenir tout l'amour du monde. Il faut, trente ans plus tard, s'être allongé face au lac de Côme dans son écrin de montagne verte parsemé de villas et avoir souhaité mourir là de ce bonheur impalpable qui vous prend totalement pour ne pas avoir envie de sourire de cet "élégianisme". L'Italie, l'Italie du Nord est pleine de ces lieux magiques où l'homme se courbe ou se redresse, saisi, dépassé par une sensualité qui le propulse dans un autre univers. Mais Boylesve évoque également la dureté des pierres, l'absence de balcons sous les fenêtres dans ce lieu de pouvoir p180. Alors que la mère de Marie lui parle d'une décision qui engage son avenir, le héros ne pense qu'au geste fugitif de Marie se débarrassant d'un objet pp203-204 ; c'est là, l'analyste qui annonce Proust, avant le passage de Ganderax. L'amour ne donne pas le bonheur, ce roman d'amour se termine sur l'amère constat : " Nous fûmes aussi malheureux les uns que les autres " qui a un goût de consolation désolée pour le narrateur exclu.

* Edition Ollendorff - 1897

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 LA BECQUEE / LES BONNETS DE DENTELLES :

 

L’histoire de la Becquée, roman qui plaça René Boylesve au rang des auteurs reconnus et admirés est assez singulière. Après avoir publié le Médecin des Dames de Néans, les Bains de Bade, Boylesve soumit à Louis Ganderax le manuscrit des Bonnets de Dentelles, deuxième version de souvenirs de jeunesse écrits à l'instigation de son ami Hugues Rebell. Cette œuvre en grande partie autobiographique conte la jeunesse d’un enfant à l’ombre de sa grande tante support de la famille et fait de l'âpreté de cette dernière à défendre son patrimoine l'axe du livre. Louis Ganderax, éditeur abusif comme il y en a eu un certain nombre, et critique conservateur, refusa l’œuvre tout en la jugeant intéressante. Il demanda à l’auteur de la réécrire dans un style classique ce que fit Boylesve. La Becquée est la troisième version de l’œuvre, celle qui fut seule connue du vivant de l’auteur. Il faudra attendre quarante ans après la mort de René Boylesve pour qu’une édition à petit tirage de la seconde version paraisse à Tours sous le titre originel des Bonnets de Dentelles, la première dort peut-être encore avec d'autres papiers inédits.

Si le succès de la Becquée semble avoir confirmé les conseils de Ganderax, le jugement de Boylesve à son sujet quelques années plus tard (« un sot grammairien pédant ») ainsi que la lecture de la seconde version nous amène à penser que l’abandon par René Boylesve du style plus libre, plus développé, qui marque les Bonnets de Dentelles, nous a peut-être fait beaucoup perdre. Ce livre s’insérait dans un ensemble dont Le Médecin des Dames de Néans constituait la première pièce ce qui n’est pas le cas de la Becquée. Peut-être, si l’auteur n’avait pas subi les mauvais conseils de Ganderax, aurions-nous pu trouver dans une sorte de Recherche du Temps Perdu, plus alerte que celle de Proust, d’autres œuvres importantes de Boylesve telle la Jeune Fille Bien Elevée, Mademoiselle Cloque, Madeleine Jeune Femme, l’Enfant à la Balustrade … qui, écrites sur un autre ton, auraient gagnées à cette continuité et mieux permis d'entrevoir les desseins de l'auteur.

 

Dédicace des Bains de Bade à Louis Ganderax, le "pédant grammairien".

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 L’ENFANT A LA BALUSTRADE :

 

L’œuvre peut-être un peu moins forte que la Becquée, mais tout aussi autobiographique, en semble le complément et est un chef d'œuvre indéniable. On y observe par les yeux d’un enfant les avatars d’un notaire de province qui affronte dans un combat tout fait de mesquineries, le potentat local. C'est l'histoire du père de l'auteur, Maître René Tardiveau qui se conclura par le suicide de ce dernier. Cette œuvre marque également le goût de l’auteur pour sa province natale et ses paysages, le jardin de la propriété qui est presque le héros du livre y occupe une place importante et est le support des longues rêveries de l’enfant. D'autres jardins marqueront l'œuvre de Boylesve, du parc des Leçons d'Amour au Souvenir du Jardin Détruit.

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 MADEMOISELLE CLOQUE :

 

Dans ce livre René Boylesve nous conte la bataille d'une vieille dame pauvre, éprise d'idéal et de chimères, contre les modernes affairistes, traîtres à leur foi, dont un évêque que l'Anatole France de Bergeret n'aurait pas renié, autour de la campagne pour la reconstruction de la Basilique de Saint Martin de Tours. Personnages que l'on retrouvera en partie dans Je vous ai désirée un soir. Mademoiselle Cloque refusera à un riche parti dont les parents sont opposés à cette reconstruction, la main de sa nièce pour l’éducation de laquelle elle s’est pourtant saignée. Cette œuvre fourmille de personnages forts qui ne sont pas seulement des inventions de l’auteur mais qui doivent beaucoup plus à un milieu qu'il a si bien su observer ? Mademoiselle Cloque elle-même est inspirée d’une vieille femme, amie de sa grand-mère, que Boylesve a bien connue, Mademoiselle Blaque et avec laquelle, jeune homme, il restera en correspondance. Aussi surprenant que cela puisse paraître, le roman de la vieille fille bigote, est une aventure forte de laquelle on a beaucoup de mal à s’extraire. Boylesve, malgré son modèle a dit, paraphrasant Flaubert, "Mademoiselle Cloque, c'est moi." signifiant peut-être par là de quel coté le portait sa nature dans ce type de conflit et l'investissement que fait un auteur dans ses personnages. D'ailleurs il n'a pas inventé la bataille de la Basilique qui a bien eu lieu.

Mademoiselle Cloque est peut-être le chef d'œuvre de Boylesve ironiste. Rarement certainement, un auteur aura autant su moquer et faire ressentir un personnage. Tous les ridicules de la vieille dame sont apparents, pourtant pour toute âme bien née, c'est vers elle que se porte la sympathie, c'est comme elle, porteuse d'idéal, que l'on sent. Ainsi c'est de nous en rupture avec la société que l'auteur dresse le portrait, nous toujours un peu désuets face à un organisme social qui dévore, qui profite aux prédateurs dut-il les laisser à leur tour sur le bord du chemin, souvent plus mal en point d'ailleurs que nous qui avons la sagesse de nous tenir le plus possible à l'écart de sa déshonorante foire. Boylesve est en réalité ce que Paul Bourget appelait un pessimiste, en rupture avec une société à laquelle pourtant il semble s'être si bien adapté, académicien, écrivain reconnu et honoré, grand bourgeois par son mariage, son pessimisme est à la fois tenu en laisse et nourri par une sorte de fatalisme (seconde bête noire de Bourget), un constat de l'inévitable dont, par exemple, il nous donnera ailleurs un aperçu, examinant l'évolution de l'éducation sur trois générations.

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 LA LECON D’AMOUR DANS UN PARC ET LES NOUVELLES LECONS :

 

Publiées à plusieurs années d’intervalle et en plusieurs livraisons en ce qui concerne les Nouvelles Leçons, il s’agit d’une ou de deux œuvres libertines dans la lignée des bains de Bade, dont le ton cependant reste assez triste et désabusé pour la seconde. On retiendra en particulier certaine tirade des Nouvelles Leçons qui fit écrire " René Boylesve, Ennemi de l’amour ", à un de ses proches, Gérard Gailly. L’œuvre a souvent été rééditée et illustrée, le Livre de poche, en 1970 l’avait mis à son catalogue la couverture étant illustrée de deux aquarelles de Pierre Brissaud, extraites de l’édition Lapina de 1925. La leçon d'amour dans un Parc, n'est pas une œuvre mineure, elle s'insère dans l'œuvre pour nous donner un aspect de la sensibilité de l'auteur, peut-être est-ce celle qui nous parle le plus de lui sous un déguisement tel qu'il nous reste difficilement accessible. Le thème de l'éducation, cher à René Boylesve, en constitue l'essentiel plus ou moins discret.

 

 

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L'édition du Livre de Poche (1970) avec, en couverture, une illustration de Pierre Brissaud 

 

 

 

 

 

 

 LA JEUNE FILLE BIEN ELEVEE et MADELEINE JEUNE FEMME :

 

Deux œuvres fortes de René Boylesve qui nous conte la mort d’une vocation artistique sacrifiée par une famille bien intentionnée et le chemin des désillusions d’une femme à principes. Romans d’observation et d’analyse denses et captivants, ces deux œuvres qui s’enchaînent, nous décrivent également la lente évolution des mœurs au travers des générations. Madeleine regarde ses enfants qui seront ce qu’elle n’a pas osée être tout comme ses ancêtres n’auraient pas compris, auraient même jugé sévèrement ses attitudes pourtant réservées. Ce personnage est peut-être une des figures de l’auteur quand il porte les yeux sur une société dont il accompagne maints développements sans se faire d’illusions et en n’oubliant jamais un passé auquel il reconnaît de nombreux mérites sans pour autant sacrifier à une nostalgie passéiste. C’est un thème secondaire mais qu'on retrouve ailleurs dans l’œuvre de Boylesve, il y aurait peut-être un rapprochement et une comparaison intéressante à effectuer entre Boylesve et son aîné et contemporain Anatole France sur ce sujet, tous deux donnant parfois l'impression à leurs contemporains de vivre une certaine ambiguïté de sentiments entre le passé et le futur. Boylesve, qui n'était pas coutumier du fait, agacé par les commentaires de la Jeune Fille, faits par certains critiques, donne une courte mais remarquable préface à la suite, Madeleine Jeune Femme, dans laquelle il insiste sur le rôle passif du romancier qui n'est que l'observateur de ses personnages, qui ne rend compte que des sensations et pensées de ces derniers. Gageons que, dès lors, il n'aurait pas tout à fait apprécié le début de mon petit commentaire de ces deux œuvres qui, il est vrai, fait plus référence à l'ensemble de l'œuvre en ce qui concerne l'interrogation passé, avenir. Le thème de l'éducation, abordé de front dans La jeune fille bien élevée, porté dans ses conséquences dans Madeleine jeune femme, est non seulement récurrent dans l'œuvre mais il en est un des deux thèmes principaux, l'autre étant celui de l'amour par essence malheureux et il n'est pas étonnant que ces deux romans qui constituent l'œuvre la plus longue de l'auteur, celle également, au-travers de Madeleine qui aura suscité le plus de réactions et qui est peut-être charnière dans la carrière de l'écrivain, traite en principal du premier et touche au second.

René Boylesve a publié trois versions de Madeleine jeune femme, chacune plus courte que la précédente, la dernière amputée de près de 25% de la version originale. Publication en décembre 1911/janvier 1912 dans la Revue des deux mondes, première publication en volume en 1912 chez Calmann-Lévy et seconde publication fortement remaniée en 1912 également chez le même éditeur. La dernière version est la plus difficile à trouver aujourd'hui.

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TU N'ES PLUS RIEN :

 

Ecrit pendant la guerre, ce roman est consacré au souvenir et au dévouement. Ironique et sensible, il est certainement l'œuvre de Boylesve la plus difficile à situer. Entre le souvenir de son frère et l'activité d'infirmière de sa femme, les sources mêlées du livre expliqueraient certainement cette ambiguïté. Il n'est pas inutile de signaler que nombre d'écrivains de l'âge de Boylesve se sont abstenus d'écrire sur cette guerre qui a pourtant été l'évènement public majeur de leurs vies. Par ce livre il ne fait pas tout à fait exception en abordant un thème parallèle à la guerre et en faisant une satyre des milieux mondains. Parue en feuilleton en 1916, dans la revue des Deux Mondes cette œuvre fut reprise en volume en 1917 non sans certaines modifications importantes.

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 LE CARROSSE AUX DEUX LEZARDS VERTS :

 

Ce roman est un conte, apparemment antireligieux, sous lequel est facilement perceptible l'allégorie du monde moderne qui se profile. Le carrosse aux deux lézards verts, c'est la possibilité de se déplacer rapidement, la nouveauté qui effacera les différences dans le monde. Ce n'est certes pas un hasard si Boylesve part d'un monde moyenâgeux, encore soumis à l'inquisition, dans lequel la liberté de pensée n'est pas assurée. Il souligne par là le contraste entre le monde d'hier et le monde de demain qu'il voit se profiler. Le décalage entre les parents et leur milieu, les parents et leurs filles bénéficiaires comme eux de la magnificence des fées est également un thème que l'on retrouve dans d'autres œuvres de l'auteur. Cette œuvre, originale, est peut-être la plus francienne de l'auteur.

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 JE VOUS AI DESIREE UN SOIR

 

Ce texte est certes un des bons romans de René Boylesve qui demande pour être apprécié à juste valeur une lecture attentive, j'ai été frappé de constater que mon homonyme, qui a longtemps été le seul biographe de René Boylesve, s'interroge sur l'existence d'une dame de Blou dans la jeunesse de l'auteur et il n'est pas le seul à le faire. C'est que certaines petites observations y frappent par leur justesse et un ton d'authenticité qui donne l'impression de dépasser le domaine du romancier. Il est fort possible que le lycéen René Tardiveau ait connu une initiation si précoce et de cette nature. Quand il publie ce roman, en 1924, René Boylesve est en pleine possession de ses moyens et a quasiment écrit toute son œuvre puisqu'il ne lui reste plus que deux années à vivre. Il est vrai que la première version du texte parue en 1922 sous le titre de Ah! Plaisez-moi, Gérard-Gailly nous a dit comment Boylesve se laissa influencer par lui, au sujet de la nature de Mme de Blou, et revint sur son premier projet selon l'opinion de son ami, puis le reprit après publication parce que finalement c'était bien la première version qui avait sa préférence. " Par suite de quelles circonstances réunies, et chacune sans doute impondérable, cette ligne d'un corsage féminin plus imposée qu'offerte à ma vue, durant un office religieux, anima-t-elle mes sens jusque là si tranquilles ?... Mais d'où vient la forme qui touche ?" p51 et le narrateur continue :  " Ma sérénité, ma docilité, ma régularité, ma piété tombèrent là, à cette heure et à cet endroit précis. ..." p52   A noter encore ce lien entre sensualité et religion, l'une chassant, ici, l'autre. L'auteur ne veut pas que l'on puisse manquer ce lien, dans ce rôle, puisque que quelques pages plus loin il précise : " Elle court avec moi jusqu'au divan de perse bleue fatigué, et là, m'écrase contre cette poitrine qui, aujourd'hui, pour moi, a lutté victorieusement contre la cause de Dieu. " p55 Autre précision importante quelques pages plus loin, parlant de la lecture de Voltaire et de Diderot le narrateur nous dit : " ... j'avais découvert le talisman qui m'a consolé de toutes les déconvenues pendant le reste de ma vie " va-t-il nommer banalement : la lecture ? Non, le talisman c'est : " une interprétation à la fois amère et souriante de tous les agissements des hommes me parut, dès seize ans, être la définitive sagesse. " p59 Cette découverte est datée avec précision. Je vous ai désirée un soir, au-delà de l'aspect policier, mineur, est un livre à plusieurs facettes. Récit polyphonique à trois voix, il nous permet de découvrir Mme de Blou selon deux tiers, puis nous donne un éclairage personnel de cette femme par une lettre qu'elle adresse à sa future victime.

* Edition Fayard, Le livre de demain.

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LE PARFUM DES ILES BORROMEES :

 

Si ce livre est le plus édité, le plus lu et le plus méconnu des œuvres de Boylesve, cela tient à l'auteur qui en 1923, dans une seconde version, la cinquième selon Gérard-Gailly, bien plus faible que la troisième parue précédemment, l'amputa de quarante pour cent. Depuis lors, souvent rééditée, illustrée par de nombreux dessinateurs, cette œuvre, inspirant jusqu'à dans le détail L'amour sous les lauriers roses de Gabriel Faure, est une sorte d'archétype du roman sirupeux, passion, Italie, lacs et romantisme doucereux. Dommage qu'il lui manque les pages qui en faisait un roman bien différent, dans lequel, en particulier, il nous était donné de suivre un couple de français "moyens" de l'époque, en vacances aux lacs. La première version, parue chez Ollendorff en 1898, était déjà signalée introuvable par un biographe, en 1935. On trouvera facilement la seconde dont on aurait bien tort de se contenter. Quoi qu'il en soit la "version définitive" de cette œuvre reste à établir si, comme moi, on refuse de s'en tenir à celle de 1923.

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VOYAGE AUX ILES BORROMEES :

Sous ce titre, Gérard-Gailly publia au Divan, dans la collection du Souvenir de René Boylesve dont il ouvre la seconde et dernière série, d'une part les carnets du voyage de René Boylesve aux îles, d'autre part la première version sous forme de fiction du Parfum représentée par une courte nouvelle. Dans la notice bibliographique dont il a fait suivre cette édition, Gérard-Gailly nous parle des cinq états de ce récit, dont deux figurent dans la bibliographie, le cinquième, intermédiaire entre ces deux versions du roman, étant demeuré inédit. L'intérêt de ces textes, le voyage date de 1895, la nouvelle de 1896, est de nous montrer l'intérêt que René Boylesve a porté à cette œuvre, connue seulement hélas sous sa dernière version, tellement amputée, depuis 1923. Tant dans les carnets, descriptions, que dans la nouvelle, intrigue, on trouve des éléments de l'œuvre future. Ces versions primitives nous donnent peut-être une indication sur les raisons du choix de Boylesve de la dernière version amputée qui se rapproche beaucoup plus d'elles que celle que nous préférons avec, par exemple, la place qu'elle donne à un couple de français en voyage et qui en change la nature en l'éloignant du " roman des îles ", forme littéraire qui nous semble aujourd'hui, un peu désuète.

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LE JARDIN DETRUIT :

 

Il s'agit d'une longue nouvelle plus que d'un roman, c'est le dernier texte publié par René Boylesve. Autour de la destruction d'un jardin, celui de l'auteur en réalité, le narrateur nous promène dans des souvenirs liés à une intrigue des plus ténues sans que notre attention se relâche un instant. A la dernière page, l'analyste délicat qu'est René Boylesve, laisse la place à un sceptique amusé dans un court dialogue : "- ... La nuit que nous contenons au dedans de notre pauvre sphère est plus effrayante que le "silence de ces espaces infinis" qui émouvait Pascal... - Il y a plus simple, lui dis-je; peut-être que les gens trop heureux ont un incoercible besoin de se procurer des soucis..." Ce petit livre est certainement une des choses les plus achevées qu'ait écrit René Boylesve, dans laquelle est mise en évidence sa capacité de tenir le lecteur avec un argument minimum.

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 LE BEL AVENIR :

Dans la lignée autobiographique de La becquée et l'Enfant à la balustrade, à coté des œuvres inspirées par des proches comme Mlle Cloque et, plus tard, La Jeune fille, Le bel avenir prend une place particulière. Sans doute quelque peu inspiré du séjour au quartier latin de son auteur, c'est une œuvre en apparence plus légère que celles que nous venons de citer. Le sujet en est la rivalité de deux - voire trois - mères au sujet du "bel avenir" de leurs rejetons réciproques, deux crétins à examens - l'un d'origine très modeste, l'autre au contraire fruit d'une bonne famille - et d'un jeune homme léger, à la belle humeur, pour tout dire comme nous le dit l'auteur : "gâté par les fées". Tandis que les deux premiers, Hilaire Lepoiroux et Paul Chef-Boutonne, travaillent, sont fiers de leurs résultats, le troisième, Alex Dieulafait d'Oudart papillonne, va de grisette en grisette en douces aventures. La mère de ce dernier, provinciale, monte à Paris pour mieux s'occuper - sans résultat - des études de son rejeton. Le ton est ironique et l'ironie y est plus affichée, plus visible que dans les autres ouvrages de l'auteur. Les courts chapitres sont faits semble-t-il pour un public plus large, qui se fatigue plus rapidement et qui a besoin de mesurer sa progression dans l'œuvre. Le texte est aéré de dialogues plus nombreux et l'on trouve même des situations de vaudeville quand la belle Mme Beaubrun sort avec Alex de la chambre de ce dernier où elle a été reçue par la mère pour y entrer de nouveau, avec le même, par la seconde porte, "l'entrée particulière" pour un tout autre entretien ou dans le chassé croisé de l'escalier de l'hôtel Condé et de Bretagne quand Raymonde croise Louise. René Boylesve protesta dans une lettre privée auprès de Marcel Ballot de ce qu'il n'avait pas voulu dire que le travail ne servait à rien pour arriver. On veut bien le croire puisque son sujet n'était pas là, mais c'est quand même le bel Alex, dilettante et amateur dans l'âme qui aura le "bel avenir" et la férocité dérisoire finale la "fort jolie voix de baryton ténorisant" de Paul Chef-Boutonne ne convaincra personne du contraire. On peut se demander si René Boylesve - qui plut aux jeunes femmes - n'a pas joué en se peignant un peu et certainement sans complaisance en Alex, à se donner une mère, gentille, attentive, complice et naïve telle que finalement il aurait pu l'imaginer. L'image de Louise est très touchante et cette héroïne boylesvienne n'est certainement pas, elle non plus, étrangère à la vie d'étudiant de l'auteur même si la fin qu'il lui réserve - conforme à sa vision pessimiste de l'amour - ne fut certainement pas celle du modèle. Ce livre, comme d'autres de l'auteur, contient de belles pages nostalgiques sur le jardin et la propriété abandonnés de Nouaillé, paradis perdu, paradis retrouvé. Le Bel Avenir est un livre qui est très au-dessus de son ton par ses qualités d'écriture, les nombreuses observations. C'est le ton qui fait qu'on ne le place pas au même niveau que les précédents cités au début de cette critique, c'est également lui qui en fait un livre très agréable et d'une lecture facile.

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 OPINIONS SUR LE ROMAN :

René Boylesve tenait à ce que ces pages soient rassemblées et publiées. Les différents textes, préfaces, réponses à des enquêtes, pages de journal, que Gérard-Gailly réunit pour les publier peu de temps après la mort de René Boylesve, ne sont pas des écrits critiques mais plus des aperçus sur l'œuvre de leur auteur. L'essentiel et Boylesve le répète souvent, est que l'écrivain, le romancier, à ses yeux, n'a pas de meilleure tâche que de fixer la réalité de la société et des hommes qui la composent. Ce qui intéresse Boylesve c'est l'homme "moyen", celui à qui il n'arrive rien d'extraordinaire. Il ne recherche pas les événements, les actions soutenues, il n'a qu'une façon de tenir en haleine le lecteur : faire ressentir. Tout l'art de Boylesve est dans sa puissance d'évocation et c'est cette puissance qui donne à ces livres cette force que l'action ou l'intrigue donnent à beaucoup d'autres.

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M à j 27/8/2008

D'autres commentaires des œuvres de René Boylesve viendront compléter cette rubrique.

 

 

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